/

L'impact de l'électrification des voitures sur l'économie wallonne

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2020
  • N° : 96 (2020-2021) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 28/10/2020
    • de CASSART-MAILLEUX Caroline
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Sous son chapitre « Mobilité », la Déclaration de politique régionale 2019-2024 met l'accent sur l'électrification des véhicules que ce soit de manière indirecte ou expresse. On le lit de manière indirecte lorsque un point est consacré aux aires d'autoroutes qui devront être munies de services de recharge électrique. On le remarque de manière explicite lorsque la DPR prévoit que le Gouvernement « promouvra les véhicules fonctionnant au gaz naturel, à l'électricité, à l'hydrogène et les véhicules hybrides ».

    Un article récent dans la presse nous apprend toutefois que l'électrification des véhicules ne sera pas sans conséquence sur l'emploi, notamment wallon. Plusieurs études européennes tablent en effet sur des milliers de pertes d'emplois, les moteurs étant moins complexes et nécessitant dès lors moins d'entretien. Ce qui signifierait une perte de près de 130 000 emplois dans l'après-vente (garagistes …) rien qu'en Allemagne et 30 000 en France. Si une étude comparable n'a pas été réalisée pour notre pays, l'estimation serait, en transposant ces chiffres au marché belge, de 4 000 emplois passant à la trappe pour toute la Belgique d'ici 2036.

    Un représentant de Traxio (Fédération belge du commerce, de la réparation automobile et des secteurs connexes) a indiqué qu'il était conscient de l'impact négatif de l'électrification des véhicules sur le chiffre d'affaires du secteur de l'après-vente, sur sa marge et par conséquent sur l'emploi.

    Monsieur le Ministre a-t-il rencontré des représentants du secteur ?

    Une étude concernant l'impact sur l'économie wallonne est-elle en cours ?

    Quand on connaît son optimisme et son pragmatisme, partage-t-il ces données chiffrées ?

    Ces pertes économiques éventuelles ne peuvent-elles pas être compensées par d'autres retombées économiques dans le secteur ?
  • Réponse du 19/11/2020
    • de BORSUS Willy
    Je confirme que j’ai rencontré des représentants du secteur automobile à plusieurs reprises depuis le début de la législature.

    Afin de donner un ordre de grandeur, dans le cadre de la contribution de la Région wallonne au Plan national Energie-Climat, le Gouvernement wallon a validé l’objectif ambitieux d’atteindre 19 % de véhicules « full-électriques » au niveau de la flotte de véhicules de transport de personnes à l’horizon 2030. Dès lors, toute proportion gardée, la Wallonie se situerait au niveau du scénario moyen de l’étude réalisée en France dont il est question dans l’article de presse auquel l’honorable membre fait référence.

    Il est important de rappeler que l’emploi au niveau du secteur se répartit à différents niveaux notamment chez les concessionnaires et vendeurs de véhicules, les constructeurs automobiles (qui construisent 20 % du véhicule), les équipementiers (qui produisent quant à eux 80 % du véhicule). Ensuite, il y a les emplois liés à l’entretien des véhicules, la vente de pièces détachées ainsi que la vente d’hydrocarbures. L’honorable membre comprendra donc que tous les métiers ne sont pas appelés à disparaître, certainement pas les vendeurs de véhicules, les constructeurs automobiles ainsi que les équipementiers. Ma préoccupation concerne donc principalement les emplois liés à l’entretien des véhicules, puisqu’il est clair qu’un véhicule électrique comporte beaucoup moins de pièces et doit moins souvent être « mis en ordre ». Cependant, je nuancerais quand même le fait que beaucoup de pièces restent identiques, notamment la carrosserie, les roues, freins, et cetera. La vente de carburants sera également impactée. Cependant, des bornes de rechargement pour véhicules électriques devraient également apparaître ainsi que la vente de CNG et à terme d’hydrogène.

    Une étude réalisée sous une législature précédente en collaboration avec les fédérations, des professeurs de l’ULG et le pôle Mécatech a montré que la plupart des acteurs qui pourraient profiter de l’électrification des véhicules ne sont actuellement pas répertoriés dans le secteur auto, mais plutôt dans ceux de la chimie, l’électricité, la plasturgie, et cetera. Il y aura donc de nouvelles opportunités d’emploi, mais pas dans des secteurs actuellement liés à l’automobile.

    Par contre, à échéance identique, il y a lieu de mentionner une autre tendance au niveau des véhicules thermiques qui devraient, eux aussi, avoir gagné en fiabilité les prochaines années générant un phénomène similaire de moindre recours à des entretiens et dont le secteur constate déjà les impacts aujourd’hui.

    Les véhicules hybrides n’entrent quant à eux pas en ligne de compte, puisqu’ils cumulent les deux technologies et nécessitent donc l’entretien des véhicules thermiques ainsi que les pièces détachées qui sont nécessaires.

    Par ailleurs, une étude sera prochainement réalisée par la Fédération Traxio sur cette question afin de prendre en compte les spécificités de la Belgique et la Wallonie en particulier. En effet, la simple transposition du modèle français au marché belge indiquerait un chiffre de 4 000 emplois supprimés à l’horizon 2036. Cependant, il convient de nuancer cette comparaison puisque la France est un pays « constructeur », vraisemblablement plus impacté que la Belgique. En effet, la construction d’un moteur thermique nécessite beaucoup plus de main-d’œuvre ce celle d’un moteur électrique.

    Finalement, il semble important que le secteur automobile européen rattrape rapidement le retard pris au niveau de l’électromobilité et de l’utilisation d’hydrogène de manière à rester une industrie compétitive. L’honorable membre n’ignore pas que la Chine et les États-Unis ont pris une avance considérable sur la production de batteries, raison pour laquelle la Commission européenne a lancé l’année dernière une Alliance pour la batterie européenne et qu’elle a récemment lancé une Alliance pour les matières premières, dont une série de métaux nécessaires à la production de batteries. Ces alliances seront déterminantes pour notre industrie européenne à court et moyen terme.