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L'impact sanitaire humain de la ligne à haute tension "Boucle du Hainaut"

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2020
  • N° : 108 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 10/11/2020
    • de DURENNE Véronique
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    Comme Madame la Ministre le sait sans doute, en Province de Hainaut, les réunions citoyennes se succèdent et mobilisent les citoyens qui s'interrogent légitimement sur les impacts du fameux projet de la « Boucle du Hainaut ».

    Pour rappel, la « Boucle du Hainaut », c'est ce projet de grande ampleur qui consiste en la réalisation d'une nouvelle liaison électrique aérienne à haute tension reliant Avelgem à Courcelles et traversant ainsi 14 communes hennuyères.

    Si les citoyens se mobilisent fortement, c'est également le cas des élus locaux. Les bourgmestres membres de la Communauté urbaine du Centre ont ainsi été reçus (à distance) début octobre par Monsieur le Ministre Borsus, à qui ils ont ainsi pu faire part de leurs interrogations et de leurs inquiétudes. Monsieur le Ministre a d'ailleurs annoncé qu'il se rendrait sur place prochainement pour une visite de terrain, ainsi qu'une rencontre avec une délégation d'agriculteurs concernés par le projet.

    En Wallonie picarde, les sept bourgmestres des communes concernées par le tracé de la « Boucle du Hainaut » ont fait savoir qu'ils refusaient unanimement le tracé actuel. Ils ont également annoncé qu'ils réclamaient une étude sanitaire auprès de Madame la Ministre, et ce afin de lever toute ambiguïté sur l'impact sanitaire humain et animal des lignes à très haute tension, et de définir des normes d'exposition en Wallonie.

    S'il est vrai que le sujet de la « Boucle du Hainaut » a déjà été plusieurs fois évoqué au sein de ce Parlement, principalement en termes d'aménagement du territoire ou d'impact sur l'environnement, l'impact sanitaire humain de ce projet mérite également toute notre attention.

    Au-delà de l'aspect aménagement du territoire, Madame la Ministre pourrait-elle me préciser de quelle façon les compétences sont-elles réparties en termes de santé entre le niveau fédéral et régional dans le cadre de ce projet ? De par sa casquette de Ministre wallonne de la Santé, comment sera-t-elle consultée sur le sujet et associée la décision ? Une étude d'impact en termes de santé peut-elle être demandée de sa part ? S'associe-t-elle aux mandataires locaux qui réclament la réalisation d'une étude sanitaire et la définition de normes d'exposition régionales ?
  • Réponse du 21/12/2020
    • de TELLIER Céline
    Le projet « Boucle du Hainaut », tel que validé par la précédente Ministre de l’Énergie, MC Marghem, vise le déploiement d’une ligne à haute tension de 380 000 Volts. Elle constituerait un développement du réseau global qui parcourt déjà la Belgique. Ce réseau comprend déjà des lignes à très haute tension pour le transport de l’énergie au niveau national, et des lignes à haute tension pour le transport au niveau régional.

    Bien entendu, j’ai suivi de près l’importante mobilisation citoyenne et des mandataires locaux qui ont exprimé des inquiétudes face à ce projet.

    Je suis entièrement consciente de l’impact potentiel de cette demande d’Elia sur le territoire de 14 communes du Hainaut. À ce stade de la procédure, la demande d’une révision du plan de secteur est du ressort de mon collègue Willy Borsus.

    La Déclaration de politique régionale prévoit en outre ceci :
    « La réalisation du projet « Boucle du Hainaut », permettra un accès à une énergie abordable, contribuera à atteindre des objectifs climatiques et soutiendra l’activité économique. Le Gouvernement mettra en place l’accompagnement nécessaire à sa réalisation en limitant au maximum l’impact négatif sur les paysages et sur l’environnement, notamment au niveau des champs électromagnétiques. »

    J’ai bien évidemment l’intention d’utiliser les compétences dont je dispose pour veiller à une limitation des impacts des champs électromagnétiques sur la population.

    Je reviens un instant sur les aspects techniques : les différentes composantes de ces lignes, jusqu’à leurs extensions qui se trouvent dans les habitations mêmes, émettent un rayonnement non ionisant sous forme de champ électromagnétique de fréquence extrêmement basse.

    Ceux-ci, à la fréquence utilisée par le réseau domestique, peuvent effectivement induire des courants électriques dans les organismes vivants. La composante électrique produit des courants circulant sur la surface du corps, et un courant résiduel à l’intérieur du corps.

    Dès lors, il est tout à fait légitime de se poser des questions sur l’impact potentiel de tel « courant électrique induit ».

    La composante électrique des champs électromagnétiques est facilement bloquée par des obstacles physiques, la peau humaine en étant un parmi d’autres. En revanche, la composante magnétique est capable de franchir facilement des obstacles (haies, murs, bâtiments, sol). Elle constitue ainsi la source principale de préoccupation pour la santé.

    Un consensus international existe au sein de la communauté scientifique : les champs électriques et magnétiques aux fréquences extrêmement basses du spectre (inférieurs à 300 Hertz) et pris séparément ne sont pas considérés comme capables de nuire à la santé.

    Pourtant, en 2002, le Centre international de recherche sur le cancer a classé l’exposition aux champs électromagnétiques de fréquences extrêmement basses comme étant « possiblement cancérogène pour l’humain » en se basant sur l’existence de données épidémiologiques les associant à des cas de leucémie infantile.

    Un avis du Conseil supérieur de la santé belge de 2008 recommande d’ailleurs de limiter l’exposition des jeunes enfants à des niveaux quotidiens maximaux de 0,4 micro-Teslas.

    D’autres études ont été menées pour préciser le lien possible entre exposition à ces champs, et le développement de tumeurs cérébrales chez les enfants, les risques d’infertilité et les problèmes liés à la grossesse, mais sans jamais aboutir à un consensus probant.

    Même si les études actuelles n’indiquent pas que les normes existantes doivent être revues, le milieu scientifique reconnaît que trois cas doivent continuer à faire débat : l'électrohypersensibilité, certaines maladies neurodégénératives et les leucémies infantiles.

    Au niveau belge, l’État fédéral n’a pas complètement légiféré en matière de champs électromagnétiques à très basse fréquence. L’Arrêté ministériel du 20 avril 1988 fixe des limites d’exposition pour la composante électrique de ces champs ; pour la composante magnétique, la Belgique se conforme aux limites maximales d’exposition recommandées par le Conseil de l’Union européenne, à savoir 100 micro-Teslas.

    Le Gouvernement flamand a fixé une norme de qualité pour le Milieu Intérieur, fixant une valeur d’intervention à 20 micro-Teslas et une valeur idéale à atteindre de 0,4 micro-Teslas. Ces valeurs limites ont pour but de protéger le public contre les risques éventuels d’une exposition prolongée. Elles n’ont, à ce jour, pas d’équivalent en Wallonie.

    En tant que Ministre de l’Environnement, j’ai la volonté de préserver la santé de la population, et notamment celle des plus fragiles, dans l’optique de faire de la Wallonie un territoire sain. Je souhaite également donner aux citoyens davantage d’outils pour se prémunir des pollutions environnementales.

    C’est pourquoi j’ai l’intention d’agir sur deux volets :
    1. D’une part travailler sur la fixation de valeurs seuils à l'instar de ce que la Flandre a développé, afin d'éviter tout risque en particulier chez les enfants ;
    2. D’autre part, approfondir à travers une étude dédiée la question de l’impact des rayonnements électromagnétiques sur la santé, l’environnement, et les êtres vivants en général.

    Ces actions feront partie des outils au service de la protection des citoyens contre les pollutions environnementales, non seulement dans la cadre du dossier de la « Boucle du Hainaut », mais aussi pour l’ensemble du territoire wallon.