La réduction des droits d’enregistrement pour l’achat d’une habitation propre et unique en Wallonie
Session : 2024-2025
Année : 2024
N° : 10 (2024-2025) 1
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Question écrite du 18/09/2024
de HUBERTY François
à DOLIMONT Adrien, Ministre-Président et Ministre du Budget, des Finances, de la Recherche et du Bien-être animal
L'une des mesures phares du Gouvernement wallon en ce début de législature est la réduction annoncée des droits d'enregistrement de 12,5 % à 3 % dans le cas de l'acquisition d'une habitation propre et unique. Il s'agit d'une mesure salvatrice pour nombre de jeunes qui souhaitent devenir propriétaires, mais qui peinent à assumer financièrement un apport en fonds propres important. Elle contribue également à une simplification du système en remplaçant les différentes aides actuelles : l'abattement dégressif, le chèque-habitat et la réduction des droits d'enregistrement pour les habitations dites « modestes ».
Comme inscrit dans la Déclaration de politique régionale, il s'agit donc bien d'un « incitant simple et lisible pour renforcer l'accès des jeunes à la propriété ».
Dans une récente conférence de presse, Monsieur le Ministre-Président a confirmé la date d'entrée en vigueur du 1er janvier 2025, un effet rétroactif étant prévu le cas échéant. Il a également précisé que la date retenue pour déterminer le régime fiscal applicable serait celle de l'acte d'achat et non celle du compromis de vente.
Dans le cas d'un effet rétroactif de sa mesure, quel serait le délai de remboursement des droits d'enregistrement perçus en trop par l'administration ?
Cette réforme prévoit-elle une modification de la définition d'une habitation unique ?
En particulier, une personne recevant des droits indivis en nue-propriété peut-elle profiter de la réduction ?
Qu'en est-il d'une personne nue propriétaire par succession ?
Pour les couples non mariés dont une des personnes est déjà propriétaire, mais pas l'autre, la réduction porterait-elle sur la moitié du bien acheté ?
Qu'en est-il de la même situation pour des mariés ?
Quelqu'un qui est déjà propriétaire d'un terrain (acheté dans le passé) peut-il bénéficier du taux de 3 % lors de l'achat de sa première habitation ?
Quel est l'impact attendu de cette réforme sur le marché immobilier ?
Monsieur le Ministre-Président pense-t-il que cette mesure permettra d'inverser la tendance à la baisse de la proportion des acheteurs de moins de 30 ans en Wallonie ?
Quelle analyse fait-il de l'évolution de la situation en Flandre depuis qu'une mesure identique de réduction des droits d'enregistrement y est en vigueur ?
S'est-il inspiré de VLABEL dans la création de son dispositif ?
Réponse du 08/10/2024
de DOLIMONT Adrien
J’ai le plaisir de rappeler à l’honorable membre que, dans sa Déclaration de politique régionale wallonne 2024-2029, le Gouvernement wallon a effectivement manifesté sa volonté de « rendre de l’oxygène à la classe moyenne par une simplification administrative et un allègement fiscal » (p. 41). Il s’agit notamment de faciliter l’achat du premier logement et de renforcer l’accès des jeunes à la propriété, et de faciliter l’accès au crédit bancaire par un droit d’enregistrement assez réduit, dès le 1er janvier 2025. Pour atteindre cet objectif, le Gouvernement va revoir profondément les droits d’enregistrement avec une diminution des droits de 12,5 % à 3 %.
Entrée en vigueur :
La mesure sera applicable aux actes notariés passés à partir du 1er janvier 2025 et aux compromis de vente enregistrés à partir de cette date. Aucun effet rétroactif n’est juridiquement prévu avant cette date et la date du 1er janvier 2025 est garantie aux redevables wallons.
Cependant, et dès lors qu’il n’est pas impossible qu’un retard de publication au Moniteur belge soit observé et que la date du 1er janvier 2025 soit légèrement dépassée pour celle-ci, même si tout est mis en œuvre afin que cela ne soit pas le cas, les redevables éventuellement concernés par ce retard obtiendront l’application du taux de 3 % postérieurement dès l’entrée en vigueur du décret instaurant celui-ci via une restitution des droits trop perçus par le Service public fédéral des Finances ; la date du 1er janvier 2025 étant garantie dans tous les cas de figure.
Quant au délai de remboursement, il est généralement de quelques semaines à dater de la demande de restitution.
Mais je reste actuellement totalement confiant sur une date de publication dans les délais.
Notion d’habitation unique :
La notion d’habitation unique en droit d’enregistrement est différente de celle utilisée pour le chèque habitat à l’impôt des personnes physiques.
Pour bénéficier du chèque habitat (qui sera supprimé à partir du 1er janvier 2025), la personne physique ne peut posséder qu’une seule habitation (elle ne peut pas être (co)propriétaire, nu-propriétaire, usufruitier, superficiaire, emphytéote ou possesseur d’autres habitations) sauf s’il s’agit : - d’une habitation reçue par succession ou par donation et détenue en indivision avec une tierce personne ; - d’une habitation mise en vente au 31 décembre de l’année de conclusion du crédit et pour autant qu’elle soit vendue au plus tard le 31 décembre de l’année suivante ; - d’une habitation louée via une Agence immobilière sociale (AIS) ou par une société de logement public.
Le taux réduit à 3 % aura un champ d’application assez large, comme actuellement pour l’abattement primo-acquérant, et sera applicable non seulement aux habitations construites, mais aussi aux habitations en construction ou sur plan, affectées à la résidence principale de l’acquéreur. De plus, la possession en indivision avec un tiers (qui n’est pas partie à la convention d’acquisition à 3 %), ou le fait de disposer d’un autre droit qu’une pleine propriété sur une autre habitation (comme un usufruit ou une nue-propriété) ne font pas obstacle à l’octroi du taux réduit sur la nouvelle acquisition. Seule la possession de la totalité de la pleine propriété d’une autre habitation y fait obstacle.
S’il y a plusieurs acquéreurs, ils ne peuvent, à cette même date, posséder conjointement la totalité en pleine propriété d’un autre immeuble d’habitation. Il est à noter que si un des acquéreurs possède déjà la totalité en pleine propriété d’une autre habitation et l’autre pas, ce dernier peut bénéficier du taux de 3 %.
Par ailleurs, seule la possession d’une autre habitation peut être problématique pour bénéficier de l’application du taux de 3 % sur une nouvelle acquisition. La possession de tout autre type d’immeuble, dont un terrain pour reprendre l’exemple de la question posée, n’est pas obstructive à l’application du droit de 3 %.
Et l’acquéreur qui s’engage à céder à titre gratuit ou onéreux (donner ou vendre) le bien obstructif éventuellement possédé dans les 3 ans à compter de l’acte d’acquisition (et non plus avec obligation de le vendre dans l’année qui suit l’acte d’acquisition comme dans le régime du chèque habitat) peut bénéficier du taux réduit.
Enfin, les notions de conjoints, cohabitants légaux ou cohabitants de fait n’ont aucun impact sur l’application de la mesure, sachant que seules les notions d’acquéreur et de résidence principale comptent.
Acquisition de droits en nue-propriété par une personne physique :
Complémentairement à ce qui est déjà répondu ci-dessus, il est précisé que l’acquisition devra bien porter sur la totalité en pleine propriété du bien, à l’exclusion de l’usufruit, de la nue-propriété ou d’une quotité indivise du bien. Toutefois, en cas d’acquisition par deux personnes physiques, l’une pour l’usufruit et l’autre pour la nue-propriété, le bénéfice du taux réduit est maintenu. Ce qui importe, c’est que les acquéreurs disposent ensemble de la totalité en pleine propriété du bien.
Impact de la mesure sur le marché immobilier :
Sur la question de savoir si le taux de 3 % attirera davantage d’acheteurs jeunes (de moins de 30 ans), je précise que c’est la volonté affirmée et l’objectif poursuivi par le Gouvernement wallon.
Pour le surplus, je renverrai à ma réponse aux questions orales de messieurs les députés Mockel et Mugemangango en commission du 16 septembre 2024.
Origine du dispositif :
Le texte du futur article 44bis du Code des droits d’enregistrement, d’hypothèque et de greffe wallon s’inspire directement de l’abattement primo-acquérant inscrit à l’actuel article 46bis du même Code. Mais avec quelques différences relatives à la mécanique d’individualisation des droits (par exemple : seuls les acquéreurs qui n’auront pas respecté une des conditions requises seront tenus au paiement de droits complémentaires).